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L’énergie osmotique, une technologie qui risque de faire des vagues
Si vous éprouvez un certain intérêt pour le marketing, vous avez probablement entendu parler de la stratégie Océan bleu. Cette stratégie consiste à sortir d’un environnement concurrentiel saturé (l’Océan rouge) pour créer un espace de marché entièrement nouveau. Au départ utilisé comme métaphore par les deux auteurs à l’origine de cette stratégie, l’océan bleu pourrait devenir à terme une réalité et constituer une nouvelle niche dans le secteur des énergies renouvelables. Comment ? La réponse tient en deux mots : l’énergie osmotique.
Le principe de l’osmose
Egalement appelée énergie bleue, l’énergie osmotique est produite grâce à la différence de salinité entre l’eau de mer et l’eau douce – celle d’un fleuve par exemple. Elle est basée sur le principe de l’osmose, qui signifie en grec « poussée ». Lorsque deux liquides de concentrations différentes sont séparés par une membrane semi-perméable, la solution la moins concentrée va vouloir passer dans le deuxième milieu pour avoir une même concentration. Dans le cas de l’énergie osmotique, une membrane semi-perméable double face, qui possède la particularité de laisser passer l’eau mais pas les sels minéraux, est mise en contact avec de l’eau douce sur une face et l’eau de mer sur l’autre face. Les molécules de sel attirent l’eau douce qui passe à travers la membrane et crée une pression dans le compartiment salé. Cette pression est captée par une turbine qui la convertit en électricité.
Le phénomène peut paraître anodin mais au plus important est le différentiel de concentration entre les deux milieux, au plus forte sera la pression. Avec une eau salée à 35 g/litre et une eau douce, l’énergie qui en résulte équivaut à une chute d’eau de 260 mètres !
Une source inépuisable et sans intermittence
Si, sur le papier, les capacités de production d’électricité à partir de cette source d’énergie semblent inépuisables – à la différence de l’éolien et du solaire, l’énergie osmotique n’est pas intermittente et donc plus fiable -, il en va tout autrement lorsqu’on passe du concept à la réalité. Tout d’abord, une centrale osmotique ne peut pas être installée n’importe où le long d’une côte. Elle a besoin d’être proche de réservoirs d’eau douce et d’eau de mer. Seuls les estuaires – les embouchures de fleuves où se mélangent les eaux fluviales et celles de la mer ou d’un océan – représentent des sites appropriés. Mais même en se limitant à tous les estuaires du globe, ceux-ci pourraient produire environ 2 térawatts, soit les deux tiers de la production mondiale et six fois la puissance que produisent toutes les centrales nucléaires du monde.
Au vu de ces chiffres qui laissent rêveur, on pourrait se demander pourquoi le secteur des énergies renouvelables ne surfe pas davantage sur l’énergie osmotique. L’explication est principalement d’ordre technologique. Les installations expérimentales existantes en Norvège, aux Pays-Bas, au Japon et aux Etats-Unis sont confrontées à de gros problèmes de rendements. Ainsi, les deux dispositifs utilisés à des fins commerciales, l’électrodialyse inverse (RED) aux Pays-Bas et l’osmose à pression retardée (PRO) en Norvège, sont équipés de membranes organiques trop fragiles et peu efficaces. Celles-ci présentent un risque d’encrassage et de dégradation graduelle élevé et ne peuvent générer que 5 watts d’électricité maximum par mètre carré. Pour envisager une exploitation rentable, il faudrait une surface de production de plusieurs centaines de milliers de mètres carrés !
Une question de temps
Pour remédier à ces faibles performances, la recherche s’active à concevoir des dispositifs techniques de plus en plus aboutis. C’est notamment le cas avec une équipe de chercheurs suisses de l’Ecole Polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL). En 2016, ils ont publié une étude démontrant qu’il serait possible, avec une membrane de disulfure de molybdène – un matériau largement disponible et facile à mettre en œuvre – épaisse de seulement trois atomes dont 30% de la surface serait couverte de nanopores, de générer une puissance électrique de 1MW/m2, de quoi alimenter plusieurs dizaines de milliers d’ampoules standards. Une autre piste, creusée par une équipe de chercheurs du CNRS, de la Sorbonne et de l’Université de Toulouse III – Paul Sabatier en France, consiste à utiliser des condensateurs permettant le stockage et la restitution de l’énergie bleue, couplés à une possibilité de dessaler l’eau de mer.
Même s’ils semblent très prometteurs, ces nouveaux procédés mettront des années avant d’être réalisés à l’échelle industrielle. Bref, si l’énergie osmotique a un bel avenir devant elle, celui-ci est encore lointain. Tout est une question de temps.
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