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Les routes et pistes cyclables solaires tiennent-elles la route ?
Les routes et pistes cyclables solaires vont-elles représenter l’énergie de demain ? La réponse n’est pas évidente, tant les experts sont divisés sur la question. Les uns estiment qu’elles vont révolutionner la manière dont nous produisons de l’électricité, les autres, au contraire, pensent qu’il s’agit d’une prouesse technologique sans avenir.
Un kilomètre solaire pour 5.000 habitants
Le principe d’une route solaire est relativement simple : des cellules photovoltaïques – des cellules capables de produire de l’électricité lorsqu’elles sont exposées aux rayons du soleil – sont intégrées à la surface des routes sur lesquelles roulent les véhicules. Le fonctionnement est le même que celui des panneaux photovoltaïques mais, au lieu d’être posés sur des toits ou des terrains, ils sont directement collés sur la route et protégés par une résine pour résister au passage des voitures et des camions. A terme, ces routes solaires sont supposées servir de véritable source de production d’électricité. Chaque kilomètre de route solaire pourrait produire assez d’énergie pour alimenter une ville de 5.000 habitants. Ainsi, un pays aussi grand que le France pourrait couvrir l’ensemble de ses besoins en électricité rien qu’en équipant un quart de ses routes de panneaux solaires.
Autres avantages et non des moindres : les routes solaires n’empiètent pas sur des terrains agricoles ou toute autre surface qui pourrait servir à autre chose et ne dégradent pas le paysage puisqu’elles ne font que remplacer des routes existantes. Elles permettraient même de se prémunir contre la neige et le verglas sans oublier toutes les opportunités d’emploi liées à la production, l’entretien et la maintenance.
La première route solaire opérationnelle au monde a été inaugurée le 22 décembre 2016 en France. Située à Tourouvre en Normandie, elle est longue d’un kilomètre, représente 2.800 m2 de cellules photovoltaïques sur l’un des deux tronçons et a pour objectif d’alimenter les lumières de la commune. Le projet, intitulé Wattway, prévoit une centaine de tests (dont la moitié à l’étranger) d’ici la fin de l’année 2017 et s’est déjà exporté dans les villes de Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux. Mais la France n’est pas la seule pionnière en la matière. Deux ans plus tôt, en 2014, dans une petite ville au nord d’Amsterdam, les Pays-Bas mettaient en service la première piste cyclable solaire au monde. Basée sur le même principe que la route solaire française si ce n’est que les panneaux solaires sont protégés entre une couche de verre, du caoutchouc de silicium et du béton, cette piste cyclable, longue d’à peine 70 mètres, aurait produit après un an de test 3.000 kW, soit suffisamment d’électricité pour alimenter une maison pendant une année complète. La route solaire semble avoir le vent en poupe et même les Etats-Unis s’y mettent puisque la mythique Route 66 sera bientôt en partie – une toute petite partie en réalité – solarisée.
Une technologie qui pose question(s)
Mais si les résultats sont encourageants et dépassent parfois les attentes comme c’est le cas aux Pays-Bas, de nombreux problèmes subsistent. Le premier est d’ordre financier. Une route solaire coûte cher, très cher même. La petite route solaire de Normandie a coûté la bagatelle de 5 millions d’euros, soit environ 2.000 euros le mètre carré, et les deux sites de Boulogne-Billancourt et Issy-les-Moulineaux ne font pas mieux avec, pour chacun, un coût de 300.000 euros pour seulement 100 m2. La rentabilité est toute relative : l’énergie produite par une route solaire coûte 4 fois plus cher que l’énergie produite par du photovoltaïque classique. Les panneaux horizontaux des routes produisent moins d’électricité que les panneaux inclinés sur les toits, sont plus facilement recouverts par les particules résiduelles et la saleté liée au trafic et risquent de s’user plus rapidement.
L’impact environnemental est également sujet à discussion : les routes et pistes cyclables solaires nécessitent des matériaux plus complexes (bétons renforcés, résines époxy et verres spécialement renforcés), des coûts en maintenance plus importants et des infrastructures plus complexes. Enfin, dernière question soulevée et non des moindres : certains doutent que les routes solaires puissent offrir les mêmes garanties de sécurité que les routes classiques, notamment au niveau de l’adhérence des pneus.
Alors, les routes et pistes cyclables solaires ne seraient-elles pas une idée aussi lumineuse qu’on le prétend ? Il est encore trop tôt pour le dire. Après tout, la première route solaire au monde n’a même pas un an d’existence. De plus, la technologie pourrait être bien plus rentable dans des pays aux températures bien plus clémentes que la pluvieuse commune de Tourouvre-sur-Perche. C’est notamment le cas en Afrique où des pays comme le Maroc ont déjà marqué leur intérêt.
Bref, le feu n’est pas encore au rouge ni à l’orange pour les routes solaires mais, si des progrès significatifs ne sont pas rapidement en vue dans les années à venir, il ne restera pas vert longtemps.
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