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La transition énergétique prend le large avec la géothermie marine

Parmi les nombreuses énergies propres qui peuvent favoriser la décarbonisation, la géothermie apparaît de plus en plus comme une solution d’avenir… mais à condition d’en user avec modération. Comme nous l’avons évoqué dans un précédent article, cette technique, qui permet de récupérer la chaleur dans les nappes souterraines de la Terre, a des limites. Son développement incontrôlé peut en effet épuiser très rapidement les réservoirs géothermiques et même entraîner des conséquences dommageables pour l’environnement comme des affaissements de terrain ou la pollution des nappes phréatiques. Il existe pourtant une autre ressource, basée sur le même type d’exploitation mais inépuisable : la géothermie marine. De quoi s’agit-il ?

Un réseau de chaud et de froid à partir de la mer

Contrairement à la géothermie terrestre qui est utilisée depuis l’Antiquité, la géothermie marine (également appelée thalassothermie ou maréthermie) est une technique relativement récente qui consiste à exploiter la différence de température entre l’eau chaude de surface et l’eau froide des fonds marins pour produire de l’énergie.  

Le processus se déroule en quatre étapes. L’eau de mer est d’abord pompée à une faible profondeur (entre 7 et 10 mètres). Selon la zone, la température de l’eau peut varier entre 7°C en hiver et 29°C en été. Cette eau de mer est ensuite filtrée et conduite dans une boucle jusqu’à un échangeur thermique. Dans cet échangeur thermique se trouvent deux canalisations qui font la jonction entre la mer et le site de consommation : un circuit d’eau de mer et un circuit d’eau douce. En fonction de la température de l’eau de mer et de la saison, le circuit d’eau de mer va refroidir en hiver et réchauffer en été le circuit d’eau douce. L’eau de mer continue sa boucle et retourne à la mer une centaine de mètres plus loin que le site de pompage. Si nécessaire, elle est refroidie au préalable pour avoir le moins d’impact possible sur la faune et la flore marines. La différence de température ne peut en effet pas dépasser 1°C dans un périmètre de 5 mètres. Quant au circuit d’eau douce, il est connecté à des pompes à chaleur qui récupèrent les calories ou les frigories et convertissent l’énergie marine en eau chaude ou en eau glacée en fonction des besoins. Celle-ci est ensuite acheminée, par un réseau, vers les bâtiments raccordés pour les chauffer en hiver, les climatiser en été et leur fournir de l’eau sanitaire toute l’année. Des chaudières au gaz d’appoint complètent en général l’installation pour garantir une continuité de service en toute circonstance.

La Méditerranée, un nouveau carburant durable

Comme on peut le deviner, la géothermie offre les meilleures performances dans les zones littorales à forte densité. Ce n’est donc pas un hasard si les thalassothermies se sont principalement installées au bord de la mer Méditerranée, et plus précisément sur la Côte d’Azur. L’absence de marées permet d’avoir un débit régulier d’eau de mer, la profondeur de la mer (bathymétrie) y est favorable et on y trouve de nombreuses zones urbaines peuplées à proximité des littoraux. Ainsi, à Monaco, 17% de la production d’énergie thermique consommée provient des 70 thalassothermies de la principauté, soit une économie annuelle de 15.000 tonnes de pétrole. On peut également citer la ville de La Seyne-sur-Mer, Sète, la Grande-Motte et surtout « Thassalia » inaugurée en 2016. Implantée au sein du Grand Port de Marseille, cette centrale de géothermie marine, présentée comme l’une des premières du genre en Europe, alimente l’ensemble des bâtiments qui lui sont raccordés grâce à un réseau de 3 kilomètres, soit environ 500.000 msitués dans l’écoquartier Euroméditerranée. Grâce à cette centrale, le quartier a réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 70%, sa consommation d’électricité de 40% et sa consommation d’eau de 65% ! Sans compter les nombreux avantages collatéraux : abaissement de l’effet îlot de chaleur dans la ville qui aurait été créé par la multiplication de productions autonomes, valorisation des surfaces de terrasse grâce au réseau de froid avec, comme corollaire, la disparition des tours aéroréfrigérantes au sommet des immeubles et leur pollution sonore, solution moins sensible aux hausses des tarifs d’électricité et de gaz.

Une réponse intéressante à l’explosion démographique

La France n’est pas la seule à explorer les ressources de la thalassothermie. D’autres pays européens comme l’Espagne, la Suède ou la Norvège lui emboîtent le pas. En Inde, l’Institut national des technologies océaniques (NIOT) développe dans le sud du pays une usine de dessalement alimentée par la thalassothermie. Les Petits États insulaires en développement (PEID) songent eux aussi à tirer parti de la chaleur de la mer pour réussir leur transition énergétique.

Mais si la géothermie marine est une source d’énergie moins aléatoire que d’autres énergies renouvelables et offre une réponse écologiquement intéressante à l’explosion démographique – plus de 40% de la population mondiale, soit 2,4 milliards d’habitants, est installée à moins de 100 kilomètres de la mer -, elle comporte néanmoins des inconvénients. Elle requiert une conception complexe et des investissements lourds et ne peut être prise en charge que par de grosses zones urbaines seules capables de financer un tel projet. Ainsi, la centrale de géothermie marine Thassalia à Marseille a coûté la bagatelle de 35 millions d’euros. De plus, la géothermie est moins adaptée dans certains endroits comme l’océan Atlantique où les marées ont une longueur d’onde plus longue et plus étendue et ne permettent pas d’avoir un débit régulier sur toute une journée. Le rendement optimal est dès lors réduit : le site d’extraction doit être placé plus loin dans la mer et nécessite des câbles plus longs.

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