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Quand les caprices de la marée deviennent source d’énergie

Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes. Lorsque Charles Baudelaire écrit son poème L’homme et la mer dont est issu l’extrait précédent, il ne pouvait pas imaginer à quel point il avait raison. La mer est en effet une source inépuisable d’énergie. Elle constitue une énorme réserve de chaleur (énergie marine thermique), son eau salée peut produire de l’électricité (énergie osmotique), la force des ses vagues est considérable (énergie houlomotrice) et celle de ses marées l’est tout autant (énergie marémotrice).

Le principe des vases communicants

Des quatre énergies précitées, l’énergie marémotrice est la plus mature. Elle est connue depuis très longtemps – les premiers moulins à marée dateraient de l’Antiquité sur la rivière Fleet dans la Londres romaine – et la première usine marémotrice, celle de la Rance dans le nord-ouest de la Bretagne, a été créée en 1966. L’énergie marémotrice consiste à exploiter la force des marées dues à l’action gravitationnelle de la Lune et du Soleil. Cette force peut être captée sous deux formes.

Dans la première, la centrale marémotrice utilise l’énergie issue des marées dans des zones côtières de fort marnage, soit des zones où la différence entre la marée haute et la marée basse est la plus importante (au-delà de 5 mètres et idéalement entre 10 à 15 mètres). Un barrage est établi en travers du site, dans une baie ou un estuaire. Le flux et le reflux des marées sont utilisés pour alternativement remplir ou vider un bassin de retenue selon le principe des vases communicants. A marée montante, les vannes du barrage sont fermées. Une fois que le bassin de retenue a atteint son niveau le plus bas et la mer son niveau optimal, les vannes s’ouvrent, le bassin se remplit et l’eau actionne des turbines génératrices d’électricité. A marée descendante, les vannes s’ouvrent une fois que la mer a suffisamment baissé. L’eau stockée dans le bassin se déverse dans la mer et entraîne les turbines hydroélectriques.

Des éoliennes subaquatiques

La seconde forme profite de la force des courants marins, en partie provoqués par la marée. Des hydroliennes, sortes d’éoliennes subaquatiques, sont immergées à 30 à 40 mètres de profondeur dans des zones de fort courant (supérieur à 4 ou 5 nœuds, soit 7,4 ou 9,3 km/h). Leurs pales sont actionnées par le déplacement de l’eau et l’énergie mécanique générée est convertie en électricité par une dynamo.

Si l’énergie marémotrice présente l’avantage d’être une énergie renouvelable, elle n’en présente pas moins des inconvénients, surtout dans le cas des usines marémotrices. La production d’électricité n’y est pas constante et il existe des périodes (prévisibles) où les turbines ne fonctionnent pas, faute de retenue suffisante. La construction d’un barrage nécessite des aménagements importants qui modifient les équilibres écologiques dans des zones généralement fragiles. C’est pourquoi de nombreux projets marémoteurs s’appuient sur une conception nouvelle : le lagon artificiel. Celui-ci se remplirait d’eau à marée haute puis se viderait par des sas équipés de turbines.

A l’heure actuelle, le potentiel de l’énergie marémotrice est encore peu exploité. Le nombre d’usines reste relativement limité et les hydroliennes en sont encore au stade expérimental, sauf au Royaume-Uni qui est le pays européen le plus avancé dans le domaine. Mais les choses pourraient changer dans un avenir très proche avec la disparition programmée des énergies fossiles et l’alerte au réchauffement climatique.

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